Trois références à consulter
- Défenseur des droits : Les droits fondamentaux des étrangers en France (rapport, mai 2016)
- Exilés et droits fondamentaux : la situation sur le territoire de Calais (rapport, octobre 2015)
- Conférence Les rapports 2015 du défenseur des droits (vidéo, Citéphilo, Lille, 9 novembre 2016)
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Les droits fondamentaux des étrangers en France
Le Défenseur des droits estime que le respect des droits fondamentaux des étrangers est un marqueur essentiel du degré de défense et de protection des libertés dans un pays.
Il entend, dans ce document, pointer l’ensemble des obstacles qui entravent l’accès des étrangers aux droits fondamentaux, en prenant appui sur les décisions de l’Institution mais en identifiant aussi de nouveaux problèmes juridiques.
Il convient au préalable de noter que :
- Concernant l’entrée, le séjour et l’éloignement, le droit positif autorise les différences de traitement fondées sur la catégorie juridique « étranger ». Dans ces domaines, le pouvoir discrétionnaire de l’Etat est important. Il n’est toutefois pas sans limite et ne saurait en aucun cas être discriminatoire. Il appartient au Défenseur des droits de rappeler que, même dans un domaine aussi régalien, le respect des droits fondamentaux doit être garanti.
- A l’inverse, dans la plupart des domaines de la vie quotidienne, protection sociale, enfance, santé, logement …, le droit interdit a priori d’établir des différences de traitement. Cependant, au-delà des pratiques illégales qui contreviennent à cette interdiction, comme les refus de scolarisation ou d’accès aux soins par exemple, c’est la règle de droit elle-même qui, en instaurant parfois des critères apparemment neutres, limite de fait le plein accès aux droits fondamentaux des étrangers.
Les analyses développées dans ce document entendent souligner l’écart mesurable entre la proclamation de ces droits et leur effectivité.
Loin d’être naturelles et immuables, les règles de droit consacrées aux étrangers sont autant de choix opérés par le législateur qui reposent parfois sur des considérations fluctuant dans le temps. Il est du devoir des acteurs de la défense des droits de contribuer à déconstruire ces idées préconçues, ces mythes.
Aucune période de l’histoire de l’immigration, aussi intense soit-elle, n’a modifié le socle des valeurs républicaines communes. Ni le million de rapatriés et harkis au début des années 60, pas plus que tous les Portugais, Espagnols, Italiens, Algériens, Marocains, Tunisiens, venus – pour travailler – dans les années 60 et 70. Ni les immigrés sub-sahariens que l’indépendance des Etats africains a conduits en Europe. Ni enfin les 200 000 « boat people » au début des années 70 et ce, alors que la situation économique de la France commençait à se dégrader, que le gouvernement avait suspendu l’immigration de travailleurs et que la « maîtrise des flux migratoires » était déjà un enjeu du discours politique.
Dans ce domaine, les mots utilisés, véhicules des idées et des stéréotypes, ne sont pas neutres et sans conséquence. Migrants, réfugiés, clandestins, sans papiers, immigrés, exilés sont autant de mots rarement utilisés de manière non signifiante. Si l’objet de ce document est d’évoquer les « étrangers » en tant que catégorie juridique des individus qui n’ont pas la nationalité française, le Défenseur peut être amené à utiliser le mot « migrant » pour décrire le sort de personnes sujets de droits dans un processus d’émigration, d’immigration, de déplacement. Ce terme a longtemps été vu comme le plus neutre. Il a néanmoins, depuis une période récente, tendance à être utilisé pour disqualifier les personnes, en les assimilant à des migrants « économiques », dont l’objectif migratoire serait utilitariste et, partant, moins légitime que celui opéré par le réfugié. Ainsi, l’appellation de « réfugié » est à double tranchant en ce qu’elle peut inciter à distinguer, une fois de plus, les « bons » réfugiés, ceux qui pourraient prétendre à une protection au titre de l’asile, des « mauvais » migrants dits économiques.
Cette distinction conduit à jeter le discrédit et la suspicion sur les exilés dont on cherche à déterminer si leur choix d’atteindre l’Europe est noble, « moral » et pas simplement utilitaire, avec, à la clé, le risque de priver de protection des personnes qui sont en droit d’en bénéficier. C’est cette logique de suspicion qui irrigue l’ensemble du droit français applicable aux étrangers et va jusqu’à « imprégner » des droits aussi fondamentaux que ceux de la protection de l’enfance ou de la santé. Ainsi qu’il va être démontré tout au long de ce document, le fait que le droit et les pratiques perçoivent les individus comme « étrangers » avant de les considérer pour ce qu’ils sont en tant que personnes, enfants, malades, travailleurs ou usagers du service public, conduit à affaiblir sensiblement leur accès aux droits fondamentaux.
Exilés et droits fondamentaux : la situation sur le territoire de Calais
En publiant ce rapport dont les éléments ont été recueillis au cours de deux missions des services du Défenseur des droits effectuées les 16 et 17 juin puis 20 juillet 2015, au cœur d’une actualité sans cesse mouvante, le Défenseur des droits n’est pas sans ignorer les difficultés quotidiennes auxquelles sont confrontés ceux qui ont la charge de définir et de mettre en œuvre les politiques publiques, qu’il s’agisse de maintenir les grands équilibres économiques et sociaux ou d’assurer la protection de nos concitoyens face aux risques que font peser les crises internationales et les mesures sur la sécurité.
Cependant, de par les fonctions qui lui ont été confiées par le Constituant et le législateur organique, le Défenseur des droits a pleinement vocation à rendre compte des faits tels qu’ils existent pour apprécier si ceux-ci sont conformes aux objectifs très ambitieux que notre pays s’est fixé en matière de protection des droits fondamentaux.
Les arrivées massives de populations sur notre continent nous invitent collectivement à repenser la façon dont nous devons, à l’échelle de l’Europe, organiser la circulation des personnes, la lutte contre le trafic d’êtres humains et l’accueil de ceux qui se voient contraints de quitter leurs pays d’origine.
Calais, phénomène unique en son genre, illustre cependant les limites d’une action fondée sur une approche nationale – pour ne pas dire locale – visant à assurer “la police des étrangers” alors que nous nous trouvons dans une situation proprement inédite qui appelle des réponses de fond à l’échelle internationale.
Les obstacles sont multiples et partout en Europe, les pressions électorales paralysent les approches novatrices.
Le Défenseur des droits n’a pas à faire valoir ses préférences en matière de conduite des affaires publiques dont la responsabilité exclusive incombe aux pouvoirs publics. Il lui revient en revanche de rappeler sans cesse les lignes qui doivent demeurer infranchissables, celles qui représentent nos valeurs fondamentales, qui résultent des droits dont tout individu est titulaire du seul fait de son appartenance à la communauté humaine.
Il convient de récuser les caricatures et les simplismes car la situation est extrêmement délicate. Elle n’appelle pas seulement une action humanitaire mais aussi des réponses politiques. Le Défenseur des droit ne peut qu’espérer que ce rapport contribue à nourrir une analyse pertinente de celles et ceux qui sont sommés d’agir.
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Les rapports 2015 du défenseur des droits
à Cité Philo, Lille, 9 Novembre, 2016 – 18:00 – 20:00