Dénonçant la répression des mouvements sociaux, des chercheurs ont décidé de fonder un collectif. Ils publient ici leur manifeste.
Collectif des universitaires contre les violences policières, Libération, le 25 juin 2017
Enseignants-chercheurs en sciences humaines et sociales, nous observons avec inquiétude l’augmentation de la fréquence et de la gravité des violences policières en France. Nombre d’entre nous, spécialistes des questions de sécurité, de police ou de justice, des mouvements sociaux ou des quartiers populaires, ont pu enquêter sur une réalité souvent trop peu visible dans les médias. La multiplication des arrestations arbitraires et détentions abusives lors de récentes manifestations, tant d’étudiants et de lycéens que de collègues auxquels les policiers ont pu signifier leur haine des travailleurs intellectuels, parfois doublée de propos racistes, sexistes et homophobes, nous amène à nous engager collectivement.
Des populations ciblées
Les violences policières prennent avant tout pour cible des populations paupérisées et racialisées, ainsi que des manifestants – contre les réformes d’austérité, les mesures antimigratoires ou les projets écologiquement insoutenables. Leur intensification est profondément liée à l’orientation générale des politiques économiques et sociales des dernières décennies. Le creusement extrême des inégalités et la ségrégation multidimensionnelle qui en résultent placent des pans entiers de la population dans des conditions insupportables et impliquent des modalités de maintien de l’ordre toujours plus violentes, qui délitent les solidarités existantes, entravent le travail des acteurs associatifs et achèvent d’isoler nombre de territoires.