Sur France inter, 26 mai 2017
En septembre, une annexe du tribunal de Bobigny ouvrira à Roissy, pour juger les étrangers non admis sur le territoire. Les avocats protestent contre cette justice sur le tarmac.
Chaque année, 6000 étrangers transitent par la ZAPI de Roissy, la zone d’attente pour les personnes maintenues en instance. C’est à dire tous ceux qui, pour une raison ou une autre, ne sont pas en règle pour entrer sur le territoire français. Ils peuvent y rester jusqu’à 20 jours, dans l’attente d’une décision. d’admission ou de refus. Au bout de quatre jours, c’est obligatoire, il faut passer devant le juge des libertés et de la détention.
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Pour info…
Communiqué de l’ANAFE (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers), 23 mars 2017
Maintien d’une famille en zone d’attente : trois libérations au prix de l’hospitalisation d’un enfant
Les 14 jours de privation de liberté de Grace, Falila (3 ans) et Sekou (1 an) en zone d’attente de Roissy se sont achevés lundi soir par l’hospitalisation en urgence de Sekou.
A leur arrivée en France le 6 mars 2017, Grace, sa fille Falila (3 ans) et son fils Sekou (1 an), se sont vu refuser l’entrée sur le territoire et ont été maintenus en zone d’attente de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle. La police aux frontières (PAF) a considéré qu’ils ne remplissaient pas les conditions d’hébergement et de ressources nécessaires. Grace a tenté de régulariser sa situation auprès de la PAF. En vain.
Grace a quitté en urgence la Côte d’Ivoire avec ses deux plus jeunes enfants. Elle voulait apporter son soutien à son fils ainé Adama (13 ans), confié depuis trois ans à sa tante en France ; elle avait appris qu’il avait été victime de maltraitance, le Parquet général de Créteil avait pris une ordonnance de placement provisoire auprès des services de l’aide sociale à l’enfance (ASE).
Pendant 14 jours, Grace et ses deux enfants ont fait l’objet de tentatives de renvoi tous les jours (à l’exception des trois jours de présentation au juge des libertés et de la détention et à la Cour d’appel). La famille a été maintenue de longues heures (de 11h du matin à 16h) dans la salle de maintien de l’aérogare 2E de l’aéroport : une salle froide et exigüe, sans fenêtre, sans accès direct aux toilettes, sans les commodités nécessaires aux enfants en bas âge.
Grace n’a pas toujours eu de quoi changer son fils et les douches n’étaient pas adaptées pour les jeunes enfants. Falila et Sekou ne mangeaient presque plus, étaient fatigués, énervés, et pleuraient beaucoup. La présence des forces de l’ordre et les appels incessants à l’interphone n’arrangeaient en rien leur angoisse, intrinsèquement liée à l’enfermement. Sekou est tombé malade et s’est mis à beaucoup tousser.
Les présentations devant le juge des libertés et de la détention (10 et 18 mars) et devant la Cour d’appel (13 mars) n’ont rien changé et Grace et ses enfants ont vu leur privation de liberté prolongée à deux reprises malgré les différents signalements de l’Anafé relatifs à l’état de santé des enfants et les conditions de maintien inadaptées à leur jeune âge.
Le ministère de l’intérieur saisi par l’Anafé n’a pas donné suite. Le Défenseur des droits et la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté ont également été alertés et l’Anafé a été en relation avec eux depuis.
Il aura fallu que Sekou soit hospitalisé lundi 20 mars 2017 dans la soirée en raison de l’aggravation de son état de santé (finalement jugé incompatible avec le maintien), pour que la famille soit enfin admise sur le territoire.
L’administration a une nouvelle fois privilégié la privation de liberté et l’éloignement de mineurs au mépris de leurs droits fondamentaux. L’Anafé, témoin chaque jour des traumatismes physiques et psychologiques que produit la privation de liberté en zone d’attente, rappelle une nouvelle fois son opposition ferme à l’enfermement des mineurs, isolés ou accompagnés, et veut insister sur les conséquences désastreuses du passage en zone d’attente.
Sekou, Falila et Grace sont de nouvelles victimes de l’acharnement de l’administration, de l’inhumanité et de la brutalité des politiques migratoires, qui font fi des engagements européens et internationaux pris par la France en matière de protection de l’enfance, d’interdiction des traitements inhumains et dégradants et du droit au respect de la vie privée et familiale.