Article de Barthélemy Gaillard, interview avec Emmanuel Blanchard, sociologue
publié sur le site Vice, le 23 février 2018
Lors du procès qui s’est tenu les 21 et 22 février, des gardiens de la paix ont révélé utiliser sans complexe ce mot d’une violence inouïe. Réveillant ainsi une vieille tradition policière, héritée du XIXème siècle.
Le mot est d’une rare violence : « indésirable ». Voilà comment les policiers français appellent les jeunes qui n’ont pas commis d’autres crimes que d’être dans la rue, entre potes. C’est ce qu’on a appris lors du procès qui s’est tenu les 21 et 22 février, mettant en cause quatre flics du XIIème arrondissement de Paris. Dix-huit jeunes du quartier dénonçaient des « violences volontaires » – fouilles musclées, palpations poussées, interpellations juridiquement bordeline et agressions verbales…
À la barre, l’un des policiers a expliqué qu’en l’absence de base juridique pour justifier un contrôle d’identité, ses collègues et lui avaient recours à cette curieuse expression d’« indésirables ». Et ce, en toute candeur : « Entre nous, sur la radio, on dit “on va sur des indésirables” ». Plus grave encore, le terme est visiblement entré dans le langage administratif, à en croire l’agent : « C’est même un onglet à cocher dans notre logiciel de main courante ».
Le terme a attiré l’attention d’Emmanuel Blanchard, sociologue de la police et de l’immigration : issue d’une veille tradition policière, la notion de population « indésirable » est en effet née dans les années 30 et s’est généralisée pendant la guerre d’Algérie. Son retour dans le jargon des flics interpelle le chercheur. Interview. (lire la suite)
Et voici la vidéo de l’interpellation des “indésirables” par les policiers en question, publiée sur mediapart
“Palpation, comme d’habitude”